dimanche 8 mai 2016

Verdun - The Eternal Drift's Canticles (doom/hardcore/narration) [2016]

On était sans nouvelles concrètes de Verdun depuis 2012 et son premier EP post-apocalyptique The Cosmic Escape of Admiral Masuka, un obus doom/sludge hardcore psyché qui narrait les pérégrinations nébuleuses d’un amiral Japonais cherchant à s’extirper du marasme nucléaire qu’était devenue la Terre. Il aura fallu quatre longues années aux Montpelliérains pour donner suite à cette histoire (couchée par l’ex-chanteur, aussi responsable des artworks), dont la bande son du chapitre précédent nous avait déjà convenablement refait le portrait, sans parler des concerts épiques idoines. Mais ça y est, il est là, il est palpable The Eternal Drift’s Canticles, le premier album véritable, la continuité, et peut-être même la concrétisation de sirupeuses intentions.

La transition entre JAXA, dernier morceau du EP, et Mankind Seppuku inaugurant l’objet à base d’orgue malade, transpire d’ailleurs l’évidence. Notre amiral nippon est désormais une âme errante au milieu d’un univers moins radioactif mais d’autant plus hostile par son abstraction, par ses contours infinis. Masuka lâche ponctuellement quelques phrases dans sa langue natale, se parle à lui-même et sombre dans une folie introspective magistralement mise en musique par Verdun. Le contexte n’est plus terrien, il ne s’agit plus d’échapper à une mort certaine, mais plutôt d’accepter l’inéluctable, dans l’expression d’une dérive éternelle et solitaire.

Alors que l’aspect narratif occupait déjà une place prépondérante sur l'EP, il franchit ici un palier, accentue l’immersion de l’auditeur au cœur du néant, jusqu’à nous introduire dans l’esprit de son unique personnage, gangréné par le passé, le désespoir et quelques hallucinations sournoises (Self-Inflicted Mutalitation). L’atmosphère générale est sensiblement moins torturée, se fait d’une certaine manière plus sereine, à travers une voix alternant éructations douloureuses et clarté quasi-mystique, comme pour signifier les instants de contemplation et/ou l’absolue détresse d’un Masuka en lutte perpétuelle contre ses propres démons, en plus de l’immense inconnue qui l’entoure et le traque même au fond de ses entrailles (Dark Matter Crisis, Glowing Shadows). Bien sûr, la lourdeur abyssale de la section rythmique et les circonvolutions de guitares monstrueusement massives sachant néanmoins tailler de la mélodie moribonde dans cette épaisse couche de gras, accompagnent la progression de l’amiral jusqu’aux tréfonds du système solaire (Jupiter’s Coven), laissant l’horizon ouvert pour un Masuka qui – espérons-le – n’a pas fini d’en chier.

Verdun précise et optimise sa musique autant que son récit, intrinsèquement liés (sans omettre un visuel somptueux encore une fois), et nous implique de fait totalement au sein d’un voyage sans retour, imprégné de solitude et de violence spirituelle. The Eternal Drift’s Canticles apparaît comme le début de l’accomplissement d’une quête sans fin. Le genre d’album qui ne peut s’apprécier qu’entièrement, et pourquoi pas y ajouter l’EP au préalable. Ne reste plus qu’à rouvrir nos plaies béantes en direct.

Disponible à l'infini sur Bandcamp.


  

Tracklist :
  1. Mankind Seppuku 
  2. Self Inflicted Mutalitation
  3. Dark Matter Crisis
  4. Glowing Shadows
  5. Jupiter's Coven

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